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Février 2004

à contretemps

 

 

Parmi les douze mois de l’année, février est le plus capricieux. C’est un virtuose quand il s’agit pour lui de jouer sur la gamme des températures : ses symphonies étaient en froid majeur en 1956, fantastique de douceur en 1990. A Andrézieux-Bouthéon, 17.5° séparent les moyennes mensuelles de ces deux cas ; aucun autre mois ne l’a fait.

Cette fois encore, février a trouvé le moyen de nous étonner : d’habitude, la température moyenne de sa première semaine est environ 1.5° plus froide que celle de sa dernière. Cette année, à Andrézieux, les sept premiers jours du mois ont été en moyenne plus chauds de 10.5° que les sept derniers ! L’écart grimpe même à plus de 12° à Violay et St-André–la-Côte. Un tel revirement ne s’était encore jamais vu depuis au moins 1946.

Pris dans sa globalité, ce dernier mois de l’hiver météorologique apparaît bien banal ; sa température moyenne de 3.8° à Andrézieux le place au beau milieu du peloton, 33 ont été plus doux et 24 plus froids depuis l’après guerre.

Comme nous le verrons en fin d’article, le bilan pluviométrique est assez contrasté dans notre région : un seul jour de pluie (le 22) rend le mois excédentaire dans le sud de la Plaine du Forez, au Breuil et à Bully ; sur les monts, l’abat de ce jour ne permet pas d’atteindre un cumul mensuel satisfaisant.

 

 

L’hiver plie.

On se met à rêver du printemps en cette première semaine de février : les maximales des six premiers jours dépassent toutes allègrement les dix degrés y compris sur les monts. Un anticyclone assis en méditerranée nous envoie de l’air tropical doux et sec, les températures de l’après-midi vont crescendo du premier au 6. Mis à part les fonds de vallées où l’air froid nocturne a beaucoup de mal à se réchauffer, on enregistre ce jour des maximales plus que printanières : 14.7° à St-Vérand (mais 15.8° le 2), 15.5° au Breuil (mais 17.2° le 3), 16° à Bully (mais 17.6° le 2), 17.5° à Violay, 18.1° à Feurs Randan, 18.4° à St-André-la-Côte, 19.1° à Grammond, 19.6° à Feurs, 20° à Montchal, 20.4° à Montchal Fontanes, 20.5° à St-Symphorien-sur-Coise et surtout 22.2° à Andrézieux ce qui constitue en cet endroit le nouveau record de chaleur pour une première décade de février.

Si les températures diurnes s’envolent, les nocturnes restent les pieds sur terre, du moins en plaine et vallées. Avant même l’arrivée de la nuit le bilan radiatif devient négatif, le sol refroidit donc petit à petit l’air qui le surmonte. En plaine et vallées, avec un vent quasiment nul, la couche d’air froid augmente facilement d’épaisseur et entraîne les thermomètres sous le zéro. Sur les monts et coteaux, l’épaisseur d’air froid atteint tout juste quelques décimètres, balayé qu’il est par cet air doux venu du sud. Mercredi 4 il fait 14° à Violay à 23h 40. Les traditionnelles inversions thermiques sont alors spectaculaires, particulièrement celle du 6, où l’on note plus de douze degrés d’écart entre la mini de Feurs Randan (-1.7°) et celle de Violay (10.7°). D’une manière générale, durant ces six jours, la température moyenne est nettement plus élevée sur les monts qu’en plaine : 7.7° à Feurs, 7.2° à Bully mais 10.5° à Violay ainsi qu’aux Sauvages et 10.8° à Grammond. La moyenne des minimales ce cette période se passe de commentaires : -1.5° à Feurs Randan, -1.7° au Breuil, -1.8° à Bully et +6.6° à Violay, 6.7° à Grammond.

 

La neige se replie mais ne fond pas.

Au cours de cette première semaine hors saison, la neige des adrets disparaît rapidement sous les assauts du soleil, mais s’accroche dans les envers. Vendredi 6 par exemple, on pouvait encore remarquer un petit névé en contrebas de la route de Savigny à St-Romain-de-Popey, au Péage très exactement, à 360 m d’altitude. Sur les hauteurs, les ubacs restent entièrement blancs. La persistance de cette neige faisant fi des températures élevées s’explique en grande partie par l’extrême siccité de cet air tropical. L’air sec est en effet un très bon isolant thermique ; comme à cette époque en versant nord le sol perd tout au long du jour plus d’énergie que ne lui en fourni le soleil, sa température reste toujours très froide et la neige ne fond pas.

Les deux premières décades n’apportent presque pas d’eau dans les pluviomètres : 0.9 mm au Breuil et à Bully, 2.4 aux Sauvages, 3.3 à Balbigny, 3.4 à Montrottier, 3.5 à Violay, 4.2 à Andrézieux. Des traces de congères à Violay (croix Casard), à Villechenève (Signy), à Courzieu (entre Barmont et Châtelard) ou encore à St-André-la-Côte persistent tout au long de ce mois jusqu’à l’arrivée d’une nouvelle chute de neige dans la nuit de dimanche 22 à lundi 23.

 

Pluie exceptionnelle.

Cette pluie qui débute vers la mi-journée de dimanche 22 se poursuit une partie de la nuit pour se changer en neige avant le début du jour. Lundi matin, toute la région est blanchie, du sommet du mont Boussuivre à l’oppidum de Fourvière en passant par les chambons de Balbigny. En Plaine du Forez et en fonds de vallées, l’épaisseur maximale approche les 10 cm, il s’agit alors pour ces pays de la plus grosse quantité mesurée cet hiver. La région de la Tour-de-Salvagny est particulièrement bien dotée avec une bonne douzaine de centimètres, même chose pour les hauts d’Yzeron avec une vingtaine de centimètres au sol. Bien entendu ces quelques centimètres n’ont rien d’anormal pour une fin février ; en revanche, la quantité d’eau (et neige fondue) mesurée ce lundi matin 7h dans les pluviomètres est tout à fait remarquable. A Andrézieux-Bouthéon, on recueille 39.3 mm. Jamais il n’avait autant plu en 24 h durant un mois de février depuis au moins 1947 ; le précédent record, curieusement établi lui aussi un 23 février était de 31.7 mm en 1960. Le même record tombe aussi au Breuil avec 52.1 mm, pour un poste qui en recueille habituellement moins de 45 sur tout le mois ; Bully se distingue avec 56.4 mm au relevé de lundi 7h, c’est 13 de plus que son cumul mensuel moyen. Cette seule pluie suffit à faire de février 2004 un nouveau mois excédentaire ; l’exception revient aux montagnes, habituées à davantage d’eau en février et qui n’ont de plus pas reçu grand chose durant cet épisode. Voici les millimétriques cumuls mensuels ; le nombre entre parenthèses représente la hauteur d’eau du 22, relevée comme il se doit le 23 à 7h ; la neige présente à cette heure-ci dans le cône du pluviomètre est fondue et entre dans la lame du 22. Le Breuil 59.7 (52.1),  Bully 61.3 (56.4), Balbigny 36.3 (21), Feurs Randan 32.7 (19.4), St-Vérand 40.7 (34), Andrézieux 47.4 (39.6), St-Genis-l’Argentière 57 (54), St-Symphorien-sur-Coise 52 (41), Violay 40.3 (26.5), Montrottier 45 (35), St-André-la-Côte 54.3 (35.2), Montchal Chanin 40.8 (30.2), Montchal Fontanes 41.9 (32.5), Les Sauvages 51.4 (33.2).

 

L’hiver de rompt pas.

La froidure est de retour du 23 au 29, la neige se maintient au sol pratiquement jusqu’en vallée. Sur les monts exposés à la bise on compte 6 jours sans dégel (les Sauvages, St-André, Grammond) ; tandis qu’à la même altitude, mais en un lieu protégé du vent de nord, le poste de Violay n’en enregistre que 4 et aucun pour les postes de plaine. Avec ce flux de nord, les inversions disparaissent au profit d’un fort gradient de température entre la plaine et la montagne : -4.4° de moyenne pour les sept derniers jours aux Sauvages pour seulement –0.7° au Breuil, –0.5° aux deux postes foréziens. Quelques thermomètres profitent de cette fin de mois pour établir ou égaler leur record de froid de l’hiver : -11° à St-Symphorien, -9.2° à St-André, -8.5° à Bully et Montchal Fontanes, -7.9° à Andrézieux, -7° à St-Vérand.

 

Remerciements à Madame Laval (St-Genis-l’Argentière). Messieurs : Bénier (Feurs-Randan), Blotas (Bully, Rhône),Coquard (Montrottier), Duchez (Balbigny), Le Gloahec et Maugé (Montchal), Molin (St-André-la-Côte), Rollet (St-Vérand), Subrin (Le Breuil), Thizy (St-Symphorien).

 

A Violay le 2 mars 2004.

M. Gagnard

Contact : gagnard@univ-lyon1.fr

Site Web : http://www.chez.com/gagnard/pageweb/indexclim.htm